exige V6 ( juillet 2012 )
exige V6 ( juillet 2012 )
communiqués lotus
Aout 2012, les premières Exige V6 client sortent des chaines
l'Exige voit son 4 cylindre d'origine Toyota disparaitre pour laisser place à un V6, qui n'est autre que celui de sa grande soeur l'Evora, un V6 3,5 l VVT-i à quatre soupapes par cylindre coiffé d'un compresseur Harrop HTV 1320 à technologie Eaton TVS délivrant 350 ch à 7 000 tr/min et 400 Nm à 4 500 tr/min à travers une boîte de vitesse mécanique à six rapports courts.
Un moteur déjà connu donc mais ne soyez pas déçus, il prend toute sa mesure dans cette Exige aux épaules de déménageur, qui avoue 1 080 kg sur la balance contre 1 437 kg pour l'Evora S. De quoi expédier le 0 à 100 km/h en 3,8 s, le 0 à 160 km/h en 7,9 s et atteindre les 274 km/h en pointe, de telles performances s'échangeant contre la bagatelle de 70 060 €.
Vendredi 8 juin, usine Lotus Cars, Hethel
Dans le cadre d'une opération organisée par Lotus Cars Paris, je me retrouve ce vendredi à visiter l'usine Lotus et à essayer la nouvelle Exige S V6 sur le circuit mythique de l'usine. Cette visite sera l'occasion d'un autre récit, je vais me concentrer sur l'essai de la tant attendue Exige !
Dans la salle dédiée aux élèves de la Driver Academy Lotus, Sébastien, ingénieur accousticien moteur, nous présente l'auto par une série de slides Powerpoint. Il nous lance : « vous l’avez déjà vue en arrivant, mais l’Exige entre en piste… ». On se retourne tous : non, on ne l’a encore jamais vue en vraie !!! On termine la présentation puis on descend enfin, impatients, rejoindre notre modèle d’essai
Nous découvrons l’Exige V6 grise (pardon, Sienna Brown), déjà vue dans la presse et notamment le dernier EVO anglais. Elle est presque entièrement optionnée : Premium Pack, Race Pack, Convenience Pack, air conditionné, radar de recul (c'est étrange d’écrire ça d’une Exige !), sièges chauffants, disques sur bol, jantes diamantées. Seuls les pneus sont des Corsa plutôt que des Trofeo, heureusement compte tenu du temps cataclysmique qui s’abat sur nous : mêmes les anglais sont surpris, c’est dire ! Nous faisons tous le tour de l’auto avec beaucoup d’attention.
Il est clair que l’auto a beaucoup de présence. On sort du format « jouet » de nos 111. Les goûts et les couleurs ne se discutent pas, mais pour ma part je suis toujours autant rebuté par l’arrière, qui semble dessiné à la va-vite : les feux qui ressortent, la plaque en excroissance avec les veilleuses qui dépassent, … L’avant est par contre bien plus agréable, même si l’abondance de plastique est discutable. Côté pratique, je reste sceptique : l’habitacle est évidemment le même que nos 111, le coffre est mieux fini, plus large, mais finalement moins logeable puisque la fibre est cloisonnée par la moquette.
Sébastien démarre l’auto pour une démonstration de l'effet du DPM sur l’échappement. Désolé pour le vent à décorner les bœufs, mais ça permet de se faire une petite idée.
Le mode Sport me paraît inévitable : bruit agréable, sportif, avec des borborygmes au lâché. La sonorité n’est pas très noble (ce n'est pas un six en ligne BMW ou un Flat 6), mais elle est quand même, à l’arrêt, bien plus sympa que nos 4 cylindres. En mode Touring, c’est très léger, ça n’a que peu d’intérêt. Le mode Race ne change pas fondamentalement les choses par rapport au mode Sport.
Nous en profitons pour tourner autour de la version Green Motorsport de l'Exige, mais surtout de la splendide Evora GTE qui est en cours d'essais.
Après une visite passionnante de l'usine, mon groupe peut enfin tester l'auto. Nous croisons le premier groupe qui semble très satisfait, c’est bon signe ! David, ingénieur pilote Lotus me donne le casque signé Lotus. Je le garderai bien en souvenir celui-ci !
Je m’introduis dans l’auto : jusque-là, peu de changement ! Je suis déçu par la médiocre qualité de l’habitacle. J’ai pris l’habitude au carbone et à l’alcantara de ma Cup, qui me semble être un minimum pour une auto sportive à ce niveau de prix. Rien de cela dans l’Exige V6 : c’est ce bon vieux plastique qui sert de tableau de bord. L’intégration de la prise USB pour l’autoradio est amusante : une découpe dans le vide poche passager, et hop, une option est créée. Ils ne se sont pas foulés !
David me fait signe de démarrer l’auto. Je tourne la clé et cherche le bouton Start. Raté ! Le DPM a pris la place du bouton Start, et il faut tourner la clé, à l’ancienne. Dommage, j’appréciais ce geste très typé sport.
Nous laissons le DPM sur le mode Touring, compte tenu du déluge qui s’abat. David prévient le contrôle et la barrière s’ouvre. Ca y’est, j’y suis : en Exige V6, sur le circuit référence.
Immédiatement, c’est la lourdeur de la direction qui me frappe. L’auto ne me semble pas démesurément plus large, elle ne m’impressionne pas, mais je sens vraiment que ce n’est plus le karting dont j’ai l’habitude. Ca a quelque chose de rassurant, la sensation d’une auto très stable, mais je me dis que sur les petites routes ça sera peut être moins agréable.
Nous enchaînons les premiers virages Graham Hill. Le droite est piégeur, avec une vraie mare à l’intérieur, David me demande de m’écarter légèrement pour éviter l’aquaplanning. On arrive sur Andretti, pas évident à négocier, d’autant plus que la piste parfaitement plate ne permet pas d’avoir une bonne vision des points de corde. Nous y allons très cool pour l’instant, l’auto est facile, la boîte est meilleure que la mienne, avec des verrouillages plus francs et un débattement plus court. Ce n’est pas encore la panacée malgré tout. J’accélère plus franchement dans les Senna Curves : bien qu’elles soient traversées par des vraies rigoles d’eau, l’auto reste plutôt stable. Là où mon Exige aura tendance à déhancher rapidement, ce fameux petit mouvement de roulis qu’on rencontre à bonne vitesse en traversant de l’eau, l’Exige V6 bouge moins. Je ressens un léger frémissement dans le bas du dos, mais rien d’inquiétant. Le bénéfice de l’augmentation d’empattement. Nous passons Windsock Corner pour rejoindre la première ligne droite. Là, David me fait la remarque la plus improbable de la journée : « reste bien au milieu, il arrive fréquemment que des animaux traversent la piste ». Incroyable. Les pilotes Lotus vivent dangereusement
Première ligne droite, première vraie accélération. Je pousse doucement malgré tout, les conditions ne s’y prêtent pas. L’auto ne bouge pas, ça pousse agréablement, mais pour l’instant je ne suis pas bouleversé. Freinage léger, chicane, nous arrivons sur la ligne droite Fittipaldi. Alors que je me prépare à remettre gaz, j’aperçois une forme à 200m : David ne plaisantait pas. Un lapin est posé au milieu de la piste ! En me voyant arriver, il s’écarte, pour l’instant il est aimable ! Nous passons Clark pour repartir sur un second tour plus dynamique. Les virages Graham Hill me confirment cette impression de lourdeur. Entre chaque virage, la poussée est franche, même si le moteur manque de son. Le freinage est parfait compte tenu des conditions. Le toucher de route est une réussite, sur ce point c’est une vraie Lotus : on sait parfaitement où est placée l'auto. Senna Curves confirme encore la stabilité même en appuyant plus fermement sur l’accélérateur. Je me rappelle un trackday au Mans avec mon auto dans des conditions similaires et, même si je roulais effectivement plus fort et avec des A048 usés, la traversée de rigoles d’eau était un moment de crispation, alors que l’Exige V6 ne bronche pas. En revenant dans la ligne droite Mansell, j’appuie cette fois totalement sur l’accélérateur : l’auto se lance fermement. La différence est majeure avec la Cup : alors que cette dernière donne l’impression d’être assis sur un baril de poudre qui explose en emportant l’auto dans un bruit de capsule spatiale, la poussée de l’Exige V6 donne une impression de force, mais pas de folie. A 6700 trs, les diodes me font signe de passer la vitesse. Quel changement ! Même si, en mode sport, la zone rouge serait repoussée légèrement, on coupe vraiment tôt ! Cette accélération est très (trop) linéaire. En bout de ligne droite, le freinage est parfait, l’auto ne bouge pas, nous attaquons la seconde ligne droite, qui sera ponctuée par un évitement d’urgence du lapin joueur ! Au fur et à mesure, j’attaquerai un peu plus fort, mais avec de larges marges, compte tenu des conditions.
Je ressors de ces quelques tours de piste avec un sentiment mitigé. Oui cette auto est une Lotus, ça ne fait pas de doute. Ce toucher de route est inimitable. Le freinage est excellent (même si les conditions ne sont pas optimales pour le tester). Je retrouve mon auto sur ces points. L’Exige V6 gagne en facilité de pilotage, avec une grande stabilité, et une électronique qui pilote. On peut tout désactiver, mais Lotus avoue que les pilotes sont plus rapides en mode Race qu’en mode manuel. On se croirait chez Ferrari ! David ne m’a pas proposé de passer en mode Sport sur cette session, limitant les risques. Je suis frustré par le moteur : la zone rouge est trop basse, la poussée trop linéaire, et le bruit pas fantastique. Le premier groupe a pu passer dans de meilleures conditions, et ceux qui ont testé le mode Sport indiquent qu’il y a un vrai changement de visage de l'auto. Clairement, il me faudra retester l’auto dans de meilleures conditions pour me faire une idée fiable.
Ma première conclusion est claire : c’est une excellente auto, mais elle est chère pour ce qu’elle offre, et je ne suis pas certain qu’elle permette de sauver Lotus vu son caractère exclusif. Lotus dit avoir voulu la rendre plus accessible, personnellement je ne vois pas en quoi, même si elle est plus simple à piloter. Il est toujours aussi difficile de monter et d’en descendre, le coffre est petit, l’insonorisation est médiocre, et la finition... digne de Lotus. Le debriefing de mes camarades est intéressant (qu’ils me pardonnent et complètent si j’ai mal retranscrit leur pensée) :
- Le proprio d’une Exige S 220 a un avis similaire au miens : il a aimé l’auto, mais il l’a trouvé lourde et un peu frustrante. Lui aussi veut tester dans de meilleures conditions.
- Le propriétaire d’Elise 111S S2 est convaincu : il est impressionné par la poussée, trouve l’auto très souple et parfaitement réussie. Il retrouve le plaisir de son Elise, avec un vrai moteur et sans l’impression de creux de son moteur.
- Les proprios de Ferrari trouvent l’auto idéale pour la piste, tellement légère par rapport à leur auto !
L’auto a donc bien un public, probablement pas celui des Elise/Exige S1 qui cherchent la légèreté absolue, ou celui des Elise SC/Exige S (PP/Cup) qui ont déjà le couple et gardent la légèreté. Reste à voir si le niveau de qualité proposé ne sera pas un vrai point faible compte tenu du prix. Pour moi il l’est clairement, mais je commence à envisager une Exige « idéale » en version V6 Cup
La visite s’achève malheureusement déjà. Nous sommes tous déçus des conditions météo, mais malgré tout heureux d’avoir pu profiter de ce moment unique. Il me tarde maintenant de réessayer cette Exige V6 dans de bonnes conditions. Neubauer me fera ce plaisir rapidement, puisque je suis invité deux semaines plus tard à réessayer sur route l’Exige V6 et, en bonus, l’Evora S IPS.
Mercredi 20 juin, Golf de Marivaux
C’est dans ce cadre agréable que Lucas m’accueille pour l’essai des autos, qui sont encore en route. Nous remplissons les décharges, discutons de l’auto, de la visite à Hethel. Sur ce fait, nous entendons les autos revenir. Cette fois-ci, c’est la belle Exige V6 Green qui est présente, ainsi qu’une Evora S IPS Autumn Bronze.
La chance est avec moi puisque le sol est sec, et le soleil présent. Je débute par l’essai de l’Evora. Le changement est radical : l’auto est bien finie, l’amortissement très doux, le moteur discret. C’est surprenant pour une Lotus, mais j’envisage parfaitement ce type d’auto pour mes vieux jours ou au quotidien. Nous passons rapidement en mode Sport : la boîte permet d’approcher le rupteur, le talon-pointe se fait automatiquement, la voix du moteur s’éclaircit. C’est plutôt sympa, même si la poussée reste trop faible à mon goût, et la sonorité du V6 bien trop étouffé. La boîte auto n'est pas mauvaise, mais encore un peu trop lente, très loin de ce que l'on peut croiser chez d’autres (suivez mon regard...). Je teste avec les palettes : ce n’est pas très concluant, il y un délai trop grand entre le clic sur la palette et le changement. Qui plus est l’ergonomie du volant est médiocre : les palettes sont petites, la course est molle, et elles sont surtout très éloignées du volant. Il est en de même pour les comodos de clignotants ou essuie-glace. Ca a l’avantage de laisser le volant libre pour les mains, mais ça me fait penser aux Exige avec snap-off. Pour le reste, l’auto est vraiment sympa, on retrouve encore une fois le toucher de route Lotus, et le poids n’est pas si frappant que ça.
A mi-chemin, nous inversons les rôles, et je m’engouffre dans l’Exige. Cette fois-ci, pas de blague, on met le mode Sport immédiatement. C’est mieux, bien mieux que le mode Touring, même s’il faut oublier toute notion de discrétion. Les explosions au lâcher de gaz, le grondement à chaque accélération, c’est plaisant. Je change de mode en roulant pour tester la différence entre les deux modes : a faible et moyen régime, ce n’est pas extrêmement flagrant. Ensuite, ce n’est plus la même histoire. Sur les petites routes de l’Essonne, l’amortissement de l’auto est brillant. C’est une digne Lotus sur ce point. La lourdeur me frappe moins que sur piste, mais comme je sors de l’Evora, ce n’est pas forcément fiable. La circulation rend difficile la moindre accélération : la puissance amène rapidement à des vitesses inavouables. Pas très différent de la Cup néanmoins. On sent quand même le surplus de couple, mais sur route je n’ai pas le sentiment d’en tirer beaucoup parti. Je peux cette fois-ci vraiment tester le freinage, qui s’avère parfait, avec un ABS bien calibré. Mon ressenti est finalement très similaire au test sur piste : moteur linéaire, poussée franche mais moins impressionnante en terme de ressenti que mon Exige. Même portée à 7200 trs, l’absence du cri du compresseur et du moteur poussant à plus de 8000 trs me manque tellement ! En terme d’usage, on sent bien sur route l’augmentation de largeur, sans que cela ne soit difficile. On reste loin d’une Miurcelago (je conseille à chacun d’essayer au moins une fois pour comprendre le terme « capsule spatiale de route ») ! Les portes à faux augmentés m’obligent à passer les dos d’ânes au ralenti, je vais d’ailleurs râcler la lame plusieurs fois. Ca sera une contrainte plus forte que sur nos Exige actuelles : attention à vos descentes de parking ! Nous revenons au Golf dans une dernière accélération : le grognement du V6 est quand même bien agréable, c’est ce que j’apprécie le plus dans cette nouvelle auto.
Conclusion :
Le bilan de ce double essai est mitigé : oui l’Exige V6 est une excellente auto. Elle trouvera un public j’en suis certain. Mais suffira-t-elle à rendre Lotus rentable ? J’en doute. Elle reste une auto très exclusive, très contraignante. Elle n’a pas grand-chose de plus facile qu’une Exige S Pack Performance, ou même une Cup. La sonorité du V6 est un plus, mais les sensations qu’il distille ne sont pas parfaites : il est franchement avare en sensation et ne donne pas le frisson. Je n’ai pas eu l’occasion d’essayer une Cayman S, la comparaison serait intéressante. Au final, je la trouve surtout très chère pour ce qu’elle propose ! Le niveau de finition est honteux à ce niveau de prix : écopes latérales en plastique bas de gamme, intérieur « full-plastique », comodos identiques aux 111, ... Une Exige digne de ce nom devra être équipée du Race pack, des pneus Troféo. Pour la rendre réellement utilisable sur piste, il faudra ajouter une barre de harnais, et des harnais. Et si on veut une finition digne de ce nom, il y aura sûrement des options carbone et alcantara. Pour quel tarif au final ? Les acheteurs sont-ils prêts à mettre autant ? Je ne peux que souhaiter à notre marque favorite de réussir son pari, mais en attendant je garde la mienne, que je trouve bien plus marrante, bien plus joueuse, mais aussi bien plus terrifiante et sensationnelle à conduire, malgré son petit 4 cylindres !.
Pour achever ce compte-rendu, je tiens à adresser mes remerciements à Benoît L., commercial Lotus, et plus largement à l’équipe Neubauer pour ces invitations spontanées et l’organisation parfaite de ces évènements. Merci évidemment à Lotus qui a sû nous accueillir avec beaucoup de passion, malgré les conditions politiques difficiles.
découverte de l’Exige V6 a l’usine (par Lomba)